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Un enfant à Auschwitz

Nombreux sont les témoignages d'anciens déportés ayant connu les camps de concentration nazis, que ce soit à Birkenau, Dachau, Mauthausen, Ravensbrück ou encore Auschwitz. Cependant, il est beaucoup plus rare de trouver un témoignage d'enfant ayant été détenu dans l'un de ces camps. Et pour cause, la plupart sont morts sur place, la faute à des conditions de détention horribles, à des traitements insoutenables, à des conditions de vie insalubres et inimaginables. Toutefois, l'un d'eux a survécu et a pu livrer le récit de ce qu'il a subi.

Maurice Cling est un professeur d'anglais, mais il est aussi juif, et il fut l'un des nombreux enfants à avoir été déporté à Auschwitz. Maurice a été arrêté en mai 1944, le jour de ses 15 ans, dans sa classe de quatrième, au milieu d'un cours. Avec son grand frère, sa mère et son père, Maurice Cling s'est retrouvé à Drancy pendant quelque temps avant d'être envoyé à Auschwitz. Si la vie à Drancy était plutôt joyeuse pour Maurice, la naïveté de l'enfance, les choses furent foncièrement différentes une fois arrivé à Auschwitz. D'autant plus qu'il fut séparé, dès son arrivée, de sa mère et de son père, qu'il ne revit plus jamais. Quelques mois plus tard, c'est son frère qu'il perd. Seul, il doit lutter pour se faire une place, pour survivre, pour ne pas baisser les bras, ne pas abandonner. Détruit, il n'est pas facile d'avancer dans un monde aussi noir que celui où il a vécu, surtout lorsqu'il n'y existe plus aucune solidarité entre les détenus. Il a tout de même eu la "chance" d'être envoyé à l'infirmerie du camp alors qu'il était particulièrement faible au moment de l'hiver, lui permettant ainsi de reprendre des forces et d'y rester jusqu'à l'évacuation du camp, moment où l'enfer reprit le dessus sur le "paradis" de la vie à l'infirmerie, et le désespoir sur l'espoir. En effet, début 1945, à l'approche des troupes alliées, les camps furent évacués et de longues Marches de la mort furent effectuées. Le but étant alors de rapatrier tous les détenus vers l'Allemagne afin de mettre à exécution la "solution finale", une marche au péril de la vie des prisonniers dont le but était en partie de tuer un maximum de ces détenus. Plus de 600 km imposés par les SS. Puis la Libération vint enfin. Mai 1945, les Américains sauvent toutes ces personnes emprisonnées, même s'il fallut du temps avant de retourner à la vie normale, l'enfer prenait fin petit à petit.

Ce témoignage possède une force toute particulière. Déjà parce qu'il n'a pas été écrit par un adulte, mais par un enfant, un rescapé de seulement 16 ans livrant le récit de son enfance, de la dureté de ce qu'il a vécu, des horreurs qu'il a vues. Maurice Cling, au travers de cet ouvrage, ne fait que retranscrire les notes qu'il a prises juste après la Libération, lorsqu'il n'était encore qu'un enfant. A ce témoignage, il n'a fait qu'ajouter son analyse en début et en fin d'ouvrage, sans interférer avec le contenu même des notes d'origine. C'est donc un jeune homme encore meurtri, qui n'a pas encore commencé à se reconstruire que l'on découvre. Pourtant, il semble déjà tellement adulte, il fait preuve d'une grande maturité dans son écrit où lequel il s'efforce d'être précis et de conserver une certaine neutralité face aux événements. Cela rend ce récit encore plus passionnant, mais aussi plus terrifiant et plus émouvant qu'il n'aurait pu l'être.

De l'amusement au camp de Drancy au voyage de déportation vers la Pologne, de l'internement à Auschwitz où il fut privé de toute dignité, traité comme un animal, battu et insulté, à la Libération, Maurice nous dit tout, même les moments où il se trouvait au fond du trou et qui, pour les jeunes de maintenant, pourraient paraitre honteux, etc. Ce sont des souvenirs précieux, bourrés de détails précis et utiles dans le devoir de mémoire. C'est un moyen précieux pour en apprendre plus sur le déroulement du travail dans les camps, de la vie, de tout ce qui a constitué cette terrible période.

Il est difficile de décrire ce genre d'ouvrage, son contenu, tant chaque détail, chaque mot qui le compose est primordial. Je ne peux que vous inviter à le lire.

Tag(s) : #Chronique Littérature
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